100 moutons maltraités sauvés par une coalition de refuges à Rochefort

29 mai 2024

Mardi 28 mai en fin de journée, l’Unité-Bien-Être animal réalise un contrôle dans un élevage qui compte une centaine de moutons à Rochefort (Lavaux-Saint-Anne). L’état des animaux est tel que la décision de saisie est prise en urgence. Pour accueillir une telle quantité d’animaux, de nombreux refuges se sont alliés dont Animaux en Péril, Le Rêve d’Aby, Veeweyde refuge du marais, Help Animals, Equi’Chance et Silence Animal.

Des moutons contraints de vivre courbés


Arrivées sur place, les équipes des associations sont accueillies par les services de police et les agents de l’UBEAW, présents pour assurer la sécurité de l’intervention et faire exécuter la décision de saisie. Si le premier appel aux refuges faisait état d’une cinquantaine de moutons, c’est finalement le double d’animaux qu’il faut prendre en charge en urgence. En effet, deux bâtiments pleins à craquer retiennent enfermés les ovins !

La situation est totalement inédite pour les ASBL, elles font face à plus de cent moutons contraints de vivre dans des conditions cauchemardesques. Dans un garage attenant à la maison, plusieurs dizaines de moutons sont entassés jusqu’au plafond. Certains ne peuvent pas se mettre debout, ils n’ont qu’un mètre voire cinquante centimètres de hauteur pour se mouvoir. Cette situation est causée à la fois par le bâtiment qui n’est absolument pas adapté à recevoir autant de moutons et par le non entretien de celui-ci. En effet, plus de 2 mètres de fumier acculent les moutons vers le plafond ! Une seule solution pour atteindre les animaux : ramper.

Pour le second bâtiment, les équipes découvrent un hangar destiné à l’origine à stocker de la paille. Les moutons ont été forcés de creuser de véritables galeries pour se déplacer. Tous s’y cachent et les équipes des associations doivent se glisser dans ces couloirs étroits pour en sortir tous les animaux les uns après les autres.

Outre le manque d’espace, les bâtiments sont d’une extrême dangerosité pour les animaux. Les intervenants retrouvent énormément de restes de laine coincée dans les grillages, des outils, dont des tronçonneuses et des couteaux laissés à même le sol. Des trous dans le plancher immobilisent également les moutons qui n’ont pas assez de force pour s’en extraire.

Une intervention qui a duré plus de cinq heures


La configuration des lieux complique énormément la prise en charge des moutons. Les soigneurs et bénévoles des différentes associations n’ont pas d’autre choix que de ramper sur un sol couvert d’excréments pour accéder aux animaux et les sortir enfin de cet enfer. Les galeries sont explorées les unes après les autres pour extirper les victimes.

Sophie Locatelli, présidente du Rêve d’Aby et vice-présidente d’Animaux en Péril explique « j’ai aperçu une brebis que je croyais décédée, je me suis totalement couchée pour l’atteindre et j’ai compris qu’elle respirait encore. En la sortant de ce tunnel, la brebis a marché quelques pas et s’est écroulée, nous l’avons hospitalisée dans la soirée. »

Pour certains moutons plus jeunes et agiles, de petits espaces entre les planches du hangar leur ont permis de rejoindre une prairie pauvre en herbe à quelques mètres de là. Pour tous les autres, handicapés par un manteau de laine alourdi par la crasse et les excréments, ils devaient vivre enfermés non-stop. Tous les moutons ont dû être portés un par un pour rejoindre les véhicules des refuges, ils n’avaient plus la force de se redresser.

Des moutons malades, blessés et extrêmement faibles


Le troupeau ne recevait aucun soin, la peur les a d’ailleurs gagnés à la simple vue d’humain. La grande majorité des moutons porte sur le dos quatre à cinq années de laine, une souffrance de tous les instants qui réduit grandement leur mobilité et qui favorise l’infestation de parasites. Ils sont tous attaqués par la gale, les poux et les vers. La laine est maculée de diarrhée et forme des croûtes qui emprisonnent la queue des animaux.
Les onglons des moutons sont d’une longueur épouvantable, ils ont poussé jusqu’à 15 centimètres pour certains ! Le déplacement des ovins est alors impossible, car leurs pieds sont extrêmement douloureux.

L’horreur frappe les équipes en découvrant que les moutons qui vivaient courbés ont le dos complètement dégarni et griffé à sang. À force de se déplacer dans ces espaces exigus, ils ont entaillé leur peau.

La faiblesse de certains moutons est consternante, ils n’ont plus la force de maintenir leur propre poids et s’écroulent à la sortie des bâtiments. Malgré le poids de leur laine encrassée, la majorité des moutons présente un indice de masse corporel très inférieur à la normale.

À 21h00, tous les moutons sont chargés dans les véhicules des associations et le constat est affligeant : abcès, blessures, masses sur le corps, escarres, maigreurs… Les animaux vont avoir besoin de longues semaines de soins pour se rétablir.

Le troupeau a été réparti entre tous les refuges qui sont intervenus sur la saisie dont Animaux en Péril, Le Rêve d’Aby, Veeweyde refuge du marais, Help Animals, Equi’Chance et Silence Animal.

Un propriétaire en fuite


À l’arrivée des autorités, le propriétaire a pris la fuite en scandant des propos incohérents. Nul doute que l’individu sera rapidement retrouvé et entendu par la justice pour les faits de maltraitance animale dont il est manifestement coupable.

Les ASBL sont maintenant responsables des soins des animaux jusqu’à la décision de destination finale, donnée par Céline Tellier, Ministre du Bien-être animal en Wallonie.

L’UBEA a dressé un procès-verbal pour infraction au Code Wallon du Bien-être animal. Le propriétaire pourra être poursuivi au pénal ou administrativement. Si le Parquet décide de prendre la main dans cette affaire, il pourra renvoyer la propriétaire devant le tribunal correctionnel. Celui-ci risque de 8 jours à 3 ans de prison et/ou une amende pouvant s’élever à 1 million d’euros. Si le Parquet ne poursuit pas, la main reviendra alors au fonctionnaire sanctionnateur qui pourra infliger une amende pouvant aller jusqu’à 100.000 euros, mais également un retrait de permis de détention d’animaux.